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La truite

Dernière mise à jour : 15 déc. 2020

Rubrique : La table et le droit

Droit alimentaire, culinaire et de la gastronomie

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La truite

Les poissons font l'objet de dispositions juridiques précisant leurs dénominations de vente. Ces dernières sont liées aux noms scientifiques et permettent, d'une part, d'uniformiser les appellations utilisées sur l'ensemble du territoire et, d'autre part, d'éviter l'emploi de vocables trompeurs ou pouvant prêter à confusion dans l'esprit du consommateur. Les bonnes intentions des règlements ou des usages surprennent cependant quelquefois. La dénomination « Saumon Atlantique » est indépendante du lieu de pêche ou d’élevage et correspond à l’espèce de poisson Salmo salar ! La « saumonette » n’est pas un « petit saumon », mais une portion de requin vendu à l’état pelé (cf. arrêté du 16 mars 1982 et BID 2002, n° 12, p. 18). Les « goujonnettes », déshonnêtes, ne sont en rien les juvéniles rejetons du goujon, mais des filets de sole (ou autre) coupés en petits bâtonnets émincés en biais, singeant ainsi la forme du goujon. D’autres dénominations, comme « Truite », font l'objet de précisions complémentaires (cf. Les 100 meilleurs Musées Gastronomiques de France et autres lieux gourmands, Jean-Paul Branlard, Ed. Grancher, page 277-279).

L’étiquette « Truite saumonée » se réserve, selon les usages loyaux du commerce, aux truites sauvages se nourrissant de crustacés et de crevettes, dotées de ce fait de qualités gastronomiques particulières (dixit la Cour de cassation). La coloration rose de leur chair s’acquiert au moyen de cette alimentation particulière. En application de cette doctrine, les truites de pisciculture, dont la coloration rose de la chair s’obtient au moyen d'une nourriture supplémentée en canthaxanthine, pigment xanthophylle dont l'incorporation aux aliments pour truites et saumons est légalement autorisée, ne devraient pas bénéficier de la dénomination. Mais, comme il n’est guère possible de déterminer par analyse si les pigments présents dans la chair du poisson proviennent d'une source naturelle ou bien d'une supplémentation de l'alimentation (les molécules obtenues par synthèse étant identiques aux naturelles), l'usage de la dénomination « truite saumonée » est administrativement admis (NS DGCCRF no 5360) pour les truites d'élevage dont la coloration rose de la chair s’obtient au moyen d'une supplémentation colorante de la nourriture animale.

La truite de mer ou Salmo trutta marina ou Salmo trutta trutta vit dans les fleuves côtiers de la Manche essentiellement et descend à la mer quand les eaux se réchauffent pour revenir dans les fleuves au début de l'automne. Pour les juges, ce nomadisme et cette vie aventureuse n’étaient pas ceux des truites litigieuses qui n’avaient connu que les eaux cernées des rives des étangs de Castets, dans les Landes, avant de finir leur carrière dans le palais des clients stéphanois d’un hypermarché de Saint Etienne. La chambre criminelle de la Cour de cassation, a vu dans cette fausse indication sur l’origine une vraie fausse publicité appelant une amende. Elle souligne, qu’il importe peu qu’un autre panneau porte la mention « truite royale » (!), dont la Cour, malgré ses connaissances piscicoles, cherche encore la définition zoologique. Nous sommes tentés de raccrocher ce poison bizarre à la famille des canularidés, comprenant déjà le poisson saisonnier en feuille de papier, qui se pêche du matin au soir, le 1er avril de chaque année.


Jean-Paul Branlard – Droit réservé


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